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Comment on efface les phrases : "Présence de l'Église au monde actuel"

28 août 2017
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Jean RODHAIN, « Comment on efface les phrases d'un schéma : "présence de l'Eglise au monde actuel" », Messages du Secours Catholique, n° 156, octobre 1965, p. 2.

Comment on efface les phrases d’un schéma : « Présence de l'Église au monde actuel »

Le document publié sur le Vietnam nous a valu des centaines de lettres d'encouragement.

Par contre 9 (neuf) lecteurs ont protesté, et je cite l'un d'eux qui résume les 8 autres :

« Je n'approuve pas votre article sur « Ce sont les pauvres qui payent, », car dans la guerre du Vietnam il est normal qu'il y ait des victimes. Jeanne d’Arc n’a pas gagné ses batailles avec de l'eau bénite. Cette guerre du Vietnam défend une juste cause, et vous devriez l'approuver. »

Réponse.

Il n'y a aucun rapport entre le siège d'Orléans et l’incendie d'un village au napalm. Au siècle de Jeanne d'Arc une bataille se livrait entre gens de guerre et Jeanne d'Arc ne passait pas les civils au fil de l'épée : elle pleurait en voyant couler le sang d'un soldat. La comparaison ne vaut rien. Ce qui compte, ce sont les faits actuels. Or, voici trois faits :

1 - Un évêque parle

Au Concile je rencontre un évêque vietnamien. Il me donne une précision : « Dans mon diocèse je perds chaque semaine de 1.500 à 2.000 diocésains victimes tantôt des pièges du Vietcong, tantôt des avions américains.

2. - Un missionnaire témoigne

Mon ami et compatriote, le R. P. Curien, de Saulxures (Vosges), actuellement blessé à l’hôpital Saint-Paul de Saïgon, déclare :

« Aujourd'hui, il ne reste plus rien de toute cette région. Tout est rasé. Quant aux pauvres montagnards dont on a détruit les villages et les greniers à riz, ils n'ont plus qu'à vivre comme des sangliers dans la forêt. Avant le bombardement, des haut-parleurs, du haut des avions, leur disaient de ne pas aller dans les champs et de rester dans leurs cases. Ils restaient dans leurs cases et on bombardait quand même leurs cases. Ou encore les Vietcongs les obligeaient à sortir et on les mitraillait dans les champs. Des villages étaient avertis, d'autres ne l'étaient pas.

J'ai vu mes fidèles brûler au milieu du napalm. J'ai vu les corps des enfants et des femmes disloqués par les bombes, j'ai vu raser tous nos villages... C'est pas Dieu possible ! »

Je n'ose pas transcrire ici la suite de son témoignage : vous le trouvez intégralement dans Match de cette semaine (n°860, pp.87 et 88).

3. - Un document américain

J'ai sur mon bureau un document américain établi sur place par une organisation charitable américaine qui réalise actuellement un colossal travail d'assistance. Je cite :

« A la fin de juillet, le chiffre officiel des réfugiés donné par le gouvernement était de l'ordre de 500.000 et approche maintenant de 700.000. Chaque semaine des milliers de personnes se fraient un chemin vers les villes côtières du Centre et du Sud du pays. Récemment un témoin oculaire rapportait : « Les Vietnamiens sont aujourd'hui une nation de réfugiés. »

« Ceux qui restent encore dans de plus petites agglomérations ou dans les villages ne peuvent être abandonnés, leur sort étant d'autant plus désespéré qu'ils sont souvent entourés par le Vietcong. La situation de ces malheureux a été dépeinte en ces fermes par un visiteur récent, officier d'une agence bénévole internationale :

« Tout l'effort se concentre sur la dévastation des terres, le massacre sans discrimination, et la destruction de tout moyen, de subsistance, blé ou riz. La guerre n'a jamais été une petite affaire pour les villageois. Depuis des années la politique du Vietcong dans ses raids consiste à saisir toute espèce de nourriture en manière de « taxation », à enrôler tous les jeunes de quatorze, quinze et seize ans qui leur tombent sous la main, à tuer ou kidnapper les autorités du village, les maîtres et les infirmières.

C'est encore pire maintenant ! Le Vietcong fouille chaque maison, chaque hutte. Il enlève tout le grain ou le riz, tout morceau de viande ou poisson séché. Tout l'argent. Dans une ville de 3.000 habitants, plus de cent personnes ont été tuées ou blessées - ces victimes sont toutes des civils et non des militaires. Des centaines d'enfants sont mutilés, ont les yeux crevés ou sont tués. »

« Les récifs de souffrance des réfugiés continuent d'affluer. Toute personne valide est astreinte au travail par le Vietcong, soit pour faire les routes, soit pour le transport à dos des marchandises. Des paysans du Centre Vietnam ont été conduits en troupeau jusqu'au Laos. - un voyage à pied de six semaines - pour ramener du matériel de guerre. D’innombrables désastres sont causés par les raids aériens contre le Vietcong - qui fait en sorte d'attirer les attaques aériennes sur les villages dont les habitants se refusent à se ranger de leur côté. Dans une guerre sans ligne de front, le danger est énorme.

Un gros pourcentage des réfugiés qui ont fui la zone des combats se compose d'adolescents et d’enfants qu’on peut chiffrer avec certitude bien au dessus de 200.000. »

Conclusions

1° Cette immense souffrance appelle au secours.

Nous déclenchons l'Opération « Secours aux enfants réfugiés du Vietnam ». C.C.P. 5620-09 Paris. Mentionner : Vietnam.

2° La vérité est la première des charités. J'ai le devoir de dire la vérité à des chrétiens. Il ne s'agit pas ici de politique, mais de charité. Ancien aumônier d'une division de chars, nommé à la Libération par le gouvernement du général de Gaulle Aumônier de l'Armée française, je n’ai rien d'un objecteur de conscience. Je pèse mes mots, et le répète une fois de plus ceci : chaque fois qu'une escadre pilotée par des chrétiens blancs détruit un village d'Asie avec ses femmes et ses enfants, du même coup cette escadre efface en Orient, une à une, les plus belles phrases des Schémas du Concile. Et je signe :

Jean RODHAIN.

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