Jean RODHAIN, « Voici la nuit », Messages du Secours Catholique, n° 194, février 1969, p. 2.

Voici la nuit

Il se fait tard. Le jour baisse.

On n'aperçoit plus celui qui s’agitait tant.

On n’entend plus celui qui a tant parlé.

Le chien se couche devant le feu de bois et me regarde.

La journée s’enfonce dans la nuit.

Tout s’estompe. Tout s’efface.

On n’entend plus rien.

Reste le chien.

Reste aussi le souvenir de ce brave homme : le seul qui ce matin m’a dit un mot de réconfort.

Ce mot, comme une braise rouge, me réchauffe encore.

Je ne sais même pas le nom de ce bonhomme.

Et il ne saura jamais le prix de ce qu'il m’a dit.

Voici la nuit maintenant bien installée.

Mon chien s’est enfin endormi.

Du feu il ne reste qu’une braise rouge.

Tout s’est tu. C’est l’heure où l’on compte ce qu’il y avait de vrai dans la journée.

Or le mot de cet homme fut pour moi le vrai trésor, la vraie chaleur de ma journée.

Que le Seigneur le remercie.

Je m’endors.

En paix.

SIDOINE