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Comment on fabrique, parfois, des reliques

15 février 2013
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Jean RODHAIN, "Comment on fabrique, parfois, des reliques", MSC, n° 230, mai 1972, pp. 2-3.

Un opération vérité

Comment on fabrique, parfois, des reliques

Vous allez à Lourdes. Vous cueillez vous-même une fleur près de la Grotte. Rentré chez vous, vous séchez cette fleur et vous la faites encadrer avec la mention écrite de votre main : « De la Grotte de Lourdes ». Cette fleur est authentique. Mais vous avez omis de porter la date sur le cadre.

Chez vous on reste attaché aux souvenirs de famille. Et dans 50 ans vos petits-enfants répéteront en désignant le cadre : « C’est le grand-père qui a rapporté cela de Lourdes. » Dans 100 ans on dira : « Cette fleur vient de la Grotte, elle date du XIXème siècle. » Dans 200 ans on simplifiera : « C’est une fleur qui était près de Bernadette pendant les apparitions ». Les gens ont instinctivement besoin de tout localiser. Et de simplifier. Cela indique un bon sentiment : une estime pour tout ce qui touche à la Vierge Marie. Cela comporte un inconvénient : c’est par ce procédé - involontaire - qu’on suscite parfois de fausses reliques.

De nouvelles exigences

De nos jours le public est exigeant sur ce point. Tant mieux. Il veut de l’authenticité. Il serait intéressant de chercher pourquoi on veut tout vérifier ? Cela ne provient pas des plaisanteries de Voltaire. Peut-être parce qu’on vit dans un monde technique où tout est précis et perceptible et chiffré : l’avion, l’auto, la télévision, la feuille de sécurité sociale. Peut-être aussi parce que le public a finalement la nausée de toutes les réclames publicitaires et de tant de « pressions sur l’opinion ». Alors, excédé, chacun veut vérifier avant d’acheter et contrôler avant de croire...

Le « point sensible » de Saint Pierre à Rome

A Rome à l’entrée de la basilique Saint-Pierre (près de la Pieta de Michel Ange), il y avait une colonnette isolée sur un socle que l’on a dû entourer d’un grillage : les fidèles persuadés qu’il s’agissait de la colonne de la Flagellation s’efforçaient d’en détacher des parcelles. Or cette colonnette torsadée garnie de feuillage était visiblement du plus pur style Renaissance. Et comme les guides continuaient à la désigner comme provenant de Jérusalem, il a fallu finalement l’enlever.

Mais dans cette Basilique, on vient de procéder à une autre opération bien plus significative :

Au delà du maître-autel couronné par le « Baldaquin » et situé exactement au-dessus de la tombe de l’Apôtre Pierre, voici l’abside, « point sensible » de la Basilique : c’est le couronnement de toute la démonstration d’un édifice proposant au croyant la solidité de son Église.

La « Gloire », représentation plastique du surnaturel figure l’assistance divine qui rayonne sur le magistère pontifical. Les statues de deux Docteurs latins et de deux Docteurs grecs évoquent l’universalité de l’Église. Ce chef d’œuvre du Bernin septuagénaire (1667) est agité d’un frémissement violent : c’est une Foi sincère. Ce siècle n’était pas tiède...

Au centre de cette gigantesque sculpture, l’enseignement de l’Église est symbolisé par le trône de Pierre figuré en bronze.

La « chaire de Saint Pierre »

Mais ce trône est un reliquaire : il renferme un antique siège épiscopal. Sur ce « siège épiscopal » on possède quelques points de repère. On le vénère à Rome depuis longtemps. Au XIV° siècle, lorsque les Papes sont en exil en Avignon, le bon peuple romain cristallise sur cette relique sa dévotion « au siège du Pape à Rome » : on y voit une « chaire de Saint Pierre » qui de « symbolique » devient peu à peu « vénérable ».

En 1481, le Pape Sixte IV la fait recouvrir d’une housse en brocart avec dorures.

En 1666, Alexandre VII la fait déposer dans un reliquaire au centre de la sculpture du Bernin, et ceci malgré les hésitations d’une commission spéciale chargée d’étudier son authenticité.

En 1867, à l’occasion du 8ème centenaire du martyre de Saint Pierre, ce siège épiscopal fut exposé sur un des autels de la Basilique. A cette occasion il fut examiné par des spécialistes, comme J.B. Rossi et Garucci qui le datèrent de l’époque de Charles le Chauve.

Si le Guide Bleu « signale cette Chaire en bois qui aurait servi à Saint Pierre et à ses successeurs », la plupart des archéologues restaient sceptiques sur l’usage fait par Saint Pierre lui-même de ce mobilier.

Pour tirer la question au clair, le Pape Paul VI nomme en 1968 une commission d’experts et fait descendre dans la sacristie pour examen la pièce relique. Après étude - y compris analyses au carbone 14 - le rapport complet a été publié en 1971 dans les « Mémoires » de l’Académie Pontificale d’archéologie .

De quoi s’agit-il exactement ?

Il s’agit d’un trône en bois de chêne garni de plaques d’ivoire et d’or. Ces garnitures semblent dater de deux périodes. Certaines plaques d’ivoire présentent un décor floral et géométrique avec à la base du dossier un portrait de Charles le Chauve entouré d’angelots porteurs de couronnes. D’autres éléments figurent les douze travaux d’Hercule : ce sont des carreaux d’ivoire gravé avec des colorations vertes et rouges et sertis de lamelles d’or. Ces derniers éléments sont antérieurs à Charles le Chauve : certains experts les datent des premiers siècles du christianisme sans vouloir se prononcer définitivement.

Conclusion

Il s’agit donc d’une œuvre provenant du « travail le plus évolué de l’art raffiné de la Cour de Charles le Chauve et qui fut apporté à Rome pour être offert à JEAN VII probablement par ce même empereur pour son propre couronnement le 25 Décembre 875. »

Ce siège comporte en outre des ornementations rapportées et d’une origine beaucoup plus ancienne.

Ce siège épiscopal a été utilisé par de nombreux Papes.

C’est donc une pièce précieuse qui depuis plus de onze siècles « est conservée au centre de l’Église pour symboliser et signifier le pouvoir épiscopal du premier Apôtre et de ses successeurs. C’est en ce sens qu’elle peut être considérée vraiment comme une authentique relique »

J. R.

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