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L’art des fêtes chrétiennes et ses progrès

07 novembre 2012
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Jean RODHAIN, "L’art des fêtes chrétiennes et ses progrès", L’Art sacré, 41, mai 1939, pp. 142-147.

L’art des fêtes chrétiennes et ses progrès

M. l’abbé Jean Rodhain, particulièrement chargé des questions artistiques pour la J.O.C., a organisé plusieurs manifestations, notamment la fête de la nuit du Parc des Princes, en 1937. Cette technique des fêtes est une des plus neuves et en même temps une de celles où les succès ont été le plus certains ces dernières années. On se souvient de l’article du R. P. Roguet, dans l’Art sacré de septembre 1937 : « Solennités du peuple chrétien ». M. l’abbé Rodhain a bien voulu nous faire part de ses expériences sous la forme très vivante d’une conversation.


Q. – Votre équipe se spécialise dans l’art dramatique populaire ?

R. – Que non pas ! Délimitons bien le sujet. Qui dit art dramatique, dit acteur, donc homme qui joue pour d’autres hommes. Il a besoin, celui-là, de sentir la proximité de ses pairs. « L’art dramatique conçu comme une machine montée pour un public immense a toujours fait faillite » .

Q. – Vous cherchez alors une autre solution ?

R. – Dites plutôt que nous cherchons la solution d’un tout autre problème. Il y a à l’heure actuelle des mouvements de jeunes qui ont des congrès immenses. Ces mouvements cherchent un mode d’expression à l’échelle de ces rassemblements. Il ne s’agit pas d’un spectacle à offrir à un auditoire agrandi. Il s’agit de la célébration collective d’un idéal. Il s’agit pour plusieurs milliers de jeunes rassemblés en un seul lieu de proclamer, de la façon la plus parlante, la plus prenante, leur mystique, de manière à fortifier ceux qui y croyaient déjà et à gagner ceux qui sont venus sans conviction. Il s’agit de créer une ambiance, de prendre l’assistance et de la faire participer à une conviction. Et comme nous sommes au siècle de l’architecture aux lignes sobres et simples, et ordonnées rigoureusement au but de l’édifice, ce mode d’expression doit cadrer avec le stade de béton ou le hall de ciment où il devra se situer.

Q. - N’est-ce point alors la solution par le « chœur parlé » ?

R. - Le chœur parlé est en pleine évolution et semble suivre le cheminement de la liturgie primitive. Dans l’assemblée chrétienne on commence par occuper les fidèles en les instruisant, on guide leur prière. Cela donne un texte, proposé sous forme de lecture. Pour associer l’assistance, on lui fait ratifier en commun le texte par un Amen en écho. Pour faire pénétrer ces textes davantage, on les fait reprendre en refrain : c’est le verset après la leçon, c’est l’antienne autour du psaume. Puis, avec le temps, vient le désir d’éviter la monotonie, de donner plus de vigueur, plus d’âme aux paroles : la musique paraît. La liturgie est le premier chœur parlé évolué, avec ses lois : participation de la foule en des réponses forcément brèves et judicieusement espacées.

Q. - Mais cependant le chœur parlé semblait avoir une vogue bien établie dans toutes les manifestations jocistes ?

R. - On s’en lasse vite- Après l’étonnement de la première audition où le cri d’une masse impressionne toujours, on ne tolère pas longtemps un tel régime ; de même on se fatiguerait vite d’un livre imprimé en caractères d’affiches. Le chœur parlé prend vite l’allure d’un exercice de prononciation en commun.
Il faut quelque chose pour les yeux. Les Belges, au Congrès de 1935, l’A.C.G.F., en 1936, ont commencé à déplacer les choristes sur le terrain. Mais ces déplacements sont bien proches de la gymnastique, et il est difficile de traduire pendant trois heures de suite les idées sur une pelouse par des défilés géométriques.

Q.- La Fête de Nuit de la J.O.C. n a-t-elle pas marqué un essai dans ce sens ?

R. - Nous avons essayé, en effet, d’étoffer le chœur parlé primitif. Ce soir-là il y avait le soliste habitueI. Il y avait 2.000 choristes, mais tous groupés en corps de métiers, sans raideur, avec leurs costumes de travail, avec leurs chants régionaux. Il n’y a pas eu de mouvements symboliques sur le terrain, mais la construction réelle d’un autel réel. II y avait aussi l’obscurité qui favorisait le recueillement, toutes conditions qu’on ne retrouve pas facilement. Or nous sommes assaillis de demandes de fédérations, de diocèses, qui réclament des textes et des formules pour des congrès que l’on voudrait nous voir bâtir sur le même mode, et nous cherchons...

Q. - Et que trouvez-vous ?

R. - Nous sommes bien aidés par des recherches parallèles. Naissance d’une cité de J. Richard Bloch avait été, tenté par un esprit bien éloigné de nous, un essai sans succès mais plein d’enseignements. Les mystères donnés devant les portails des cathédrales, le Jeu devant Notre-Dame, etc... sont des efforts convergents où il y a beaucoup à glaner.

N’oublions pas l’influence et donc l’apport du cinéma et de la radio.

La radio actuelle habitue de plus en plus le public à suivre un texte sur un « fond sonore ». Replacez ce public dans un congrès avec un chœur parlé : ce public sent qu’il manque quelque chose : il manque de la musique.

Le cinéma habitue lui aussi le public à associer des images et des sons. Menez ce public-là devant un chœur où des milliers de jeunes articulent consciencieusement des textes : il sera aussi désorienté que si vous remplaciez son journal illustré par un alphabet et une grammaire.

Difficultés ?

On manque de musique. On manque d’archives musicales, chants de métiers, folklore. On manque de compositeurs capables de bâtir sur un thème populaire le fond musical des nouveaux « chœurs sonorisés ». Nous avons essayé l’an dernier avec des disques. Les fêtes régionales de la J.O.C. de St-Etienne, Le Havre, Clermont-Ferrand, etc., ont groupé plus de 120.000 spectateurs. Mais nous sommes arrêtés par notre pauvreté en collaborateurs musiciens.

Nous sommes en 1939 des visuels. On vit par l’imagination. Le cinéma, le journal rempli de photos, les leçons de choses de plus en plus nombreuses à l’école ont diminué la faculté de jugement et de recueillement. Les hommes sont plus atteints que jamais par la « dispersion », l’inattention. C’est un fait. Utilisons cette faculté visuelle exagérée. Orientons-les pour leur apprendre à voir les réalités invisibles à travers le prisme de l’image. Apprenons-leur à creuser une photo, comme les disciples une parabole. Baptisons cette tendance moderne en créant des spectacles pleins de dogme.

Au moment où nous mettons sous presse, le jeu scénique de la J.A.C., donné à Paris le 23 avril, est une nouvelle réussite. Nous en rendrons compte comme il convient.

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