Journée des aumôniers
Jean RODHAIN, « Préface » in Aa..Vv.. Journées d'études des aumôniers (de prison), RèD, 1952, p. 3-4.
Journée des aumôniers
Rennes nous réserva une surprise joyeuse ; ce fut de nous rassembler plus nombreux que nous n'avions jamais été en France, à aucun rassemblement d'Aumôniers de Prisons.
Rennes nous réserva, une autre joie : celle d'heures de travail spécialement fraternelles, en cette première journée réservée à nos problèmes de pastorale.
Comme chaque année, nous l'avons constaté, et nous nous en sommes peut-être attristés : les progressions sont lentes, les grandes lignes directrices ne se précisent qu'en éclaircies insensibles. Mais, chaque pas en avant, pour minime qu'il paraisse, chaque prise de conscience d'une idée constitue un gain inestimable. Et leur somme fera un jour ‑dans bien longtemps sans doute- un corps de doctrine et d'action vraiment au point. Il nous faut donc chercher sans jamais être totalement satisfaits :
Problème de la nature exacte de notre mission dans ce milieu si spécial ;
Problème du contact. - Problème du passage du plan humain au plan spirituel. ‑ Problème de la déloyauté et de notre attitude en face d'elle. - Problème des rechutes innombrables et de notre comportement à chaque rechute. - Problèmes sacramentels. ‑ Problèmes nouveaux que posent la psychopathologie et la «psychologie des profondeurs» avec leurs apports dont certains sont très douteux, mais d'autres très valables...
Nous n'avons pas fini, et ceux qui viendront après nous n'épuiseront pas non plus la matière.
NOTRE MISSION
Nul ministère sacerdotal ne peut se contenter de l'à‑peu‑près. Mais le nôtre est certainement l'un des plus exigeants qui soient.
Les fidèles, dans les milieux libres, ont des compensations extérieures, en même temps que des ressources intérieures. Les détenus n'ont habituellement rien.
Dépouillés de secours du dehors, souvent sans force au dedans, seuls affreusement, dans la réalité et, plus encore, dans leur pensée, ils ont besoin plus que tous les autres d'une aide et d'un soutien. Mais, plus que tous les autres, ils sont difficiles à aider à cause de leurs découragements, de leurs méfiances, de leurs aigreurs, de leurs colères (souvent cachées), de leurs faux‑fuyants, de leurs mensonges. Leur âme blessée appelle et repousse les secours.
Alors, en face d'eux, nous devons aller à l'essentiel et, chacun selon nos dons et attraits personnels, avoir la hantise de leur présenter le Christ. Le Christ et Son Amour immense pour eux, Son Respect immense pour eux, Son Exigence patiente mais obstinée, et Sa Grâce qui toujours se propose.
En fait, notre ministère peut être caractérisé par trois éléments qui sont en toute activité sacerdotale, mais qui, ici, prennent une importance absolue :
Témoignage : Notre vie devrait rayonner la loyauté et la générosité et la foi et l'amour.
Souffrance : Car le problème des prisons est essentiellement un problème de rédemption.
Connaissance : Car nous ne pourrons pas aider nos détenus si nous ne les connaissons pas, d'une part; et, d'autre part, si nous ne connaissons pas très exactement les exigences du Christ à leur égard.
Essai de prise de conscience de notre mission propre, avec tout ce qu'elle engage;
Essai, de, précision du milieu, et des êtres qui le constituent, et de notre place dans ce milieu;
Essai de pénétration dans la pensée pastorale de l'Église, en particulier en ce qui concerne le sacrement de Pénitence.
Tels furent les thèmes de nos travaux.