Cet homme est tombé d'une hauteur de 3000 M.
Jean RODHAIN, « Cet homme est tombé d'avion d'une hauteur de 3000 m. », Messages du Secours Catholique, n° 11, avril-mai 1950, p. 3.
Cet homme est tombé d'avion d'une hauteur de 3000 m.
TOUS les journaux ont signalé la chute de cet homme tombé d'avion au‑dessus de la région de Saint‑Quentin, et les gendarmes n'ont pu retrouver son cadavre.
Tous les journaux ont précisé que cet homme avait ouvert lui‑même la porte de l'avion alors qu'il naviguait à 3000 mètres vers un pays de l'EST.
Un certain nombre de journaux ont précisé qu'il en venait la veille. Ayant atterri à Londres, il avait été refoulé par la police anglaise.
Un seul journal a osé dire que ce réfugié fuyait la mort, et que rembarqué de force dans l'avion, il se suiciderait en route, plutôt que de rentrer se livrer à ses persécuteurs.
Personne n'a osé dire que la cause de cette mort n'était pas à rechercher ni dans le fonctionnement de la porte de l'avion, ni dans la folie de ce suicidé, mais dans notre état social qui refuse un asile à un homme traqué.
On écrit des tonnes d'articles sur la personne humaine.
On agence des expositions admirables sur la Déclaration des droits des hommes.
Mais il y a de ce côté‑ci du rideau de fer (je ne parle pas ici de l'autre côté) des centaines de milliers d'humains qui tournent en rond dans les camps de personnes déplacées. Il y a des milliers de D.P. qui errent d'une frontière à un camp. Il y en a dans toutes les rues de Paris.
Une poignée d'œuvres (on les compterait sur les doigts d'une seule main) essaye de s'en occuper.
Cent mille braves gens le savent et les aident.
Pour qu'il y en ait quelques‑uns de plus, abonnez‑vous à "Messages".
Pour que les journaux osent dire pourquoi on se jette d'avion à 3.000 mètres, abonnez‑vous à "Messages".
Pour que notre consentement tacite ne nous rende pas complices de ceux qui ferment les portes à ces "hommes traqués", aidez‑nous.
J.R.