Paroisse d'abord
Jean RODHAIN, « Paroisse d'abord », Documents-Secours, n° 7, octobre 1963, p. 3-4.
Paroisse d'abord
Une partie notable de ce document concerne l'action charitable en Paroisse.
Un curé de paroisse (Saint‑Germain de Charonne), devenu récemment délégué général pour l'Apostolat des laïcs au diocèse de Paris, nous montre comment la charité envers les vieillards doit être l'expression de toute la Paroisse travaillant en communauté de charité (pages 14).
Car l'Église des Pauvres a un visage : c'est la Paroisse.
La Campagne du Secours Catholique sur l'Église des Pauvres est obligatoirement accrochée à la Paroisse.
Lorsque vous interrogez sur la pauvreté dans l'Église, neuf fois sur dix la réponse cite un exemple local emprunté au presbytère ou au quartier.
La famille a beau être paganisée, il lui faudra pour l'acte de baptême s'adresser à la Paroisse. L'écran de télévision a beau faire défiler tous les horizons du monde, au premier deuil la famille passera par l'église paroissiale. Et même dans les ensembles inhumains ou dans les quartiers désarticulés, c'est à la cellule paroissiale qu'on revient. Cellule, communauté, on peut chercher tous les noms, mais cela reste accroché à un point fixe : la Paroisse.
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Un mouvement d'ingénieurs, ou d'étudiants, ne se ramifie pas obligatoirement jusqu'à la paroisse : il y a des paroisses de campagne sans étudiants, et il existe des zones rurales où les ingénieurs sont rares... Mais la misère est partout, même dans la ferme isolée, donc la charité de l'Église doit se ramifier jusque dans la dernière paroisse du diocèse.
Le badaud étourdi associe le Secours Catholique à l'avion qui part vers le tremblement de terre. Et c'est déjà bien qu'il fasse le rapprochement.
Mais ce qui irrigue la culture ce n'est pas la cascade admirée de badauds, c'est la pluie fine et régulière. Le vrai travail du Secours Catholique c'est l'action régulière, locale, incessante de 28.000 représentants paroissiaux.
Comme dans une fourmilière chaque fourmi ouvrière, à sa place, répare la brèche...
Comme dans un corps humain ‑ tant qu'il est vivant ‑ à la première écorchure les cellules se disposent à reconstituer le tissu et s'ordonnancent localement pour cicatriser la plaie...
Aussi dans une délégation diocésaine quand elle est vivante ‑ la vitalité se situe au plan local, sur le vif : Où en est son réseau paroissial ? Parler de l'Église des Pauvres sans travailler à ce réseau, c'est un travail de Gribouille se payant de mots.
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L'Action Catholique générale a choisi comme thème de Campagne d'année : La Paroisse, communauté de charité. Ainsi Secours Catholique, A.C.G.H. et A.C.G.F., une fois de plus, se rejoignent dans leurs Campagnes convergentes. C'est normal d'ailleurs que l'Action Catholique et l'Action Charitable se retrouvent dès que l'une et l'autre entrent dans le chemin de l'Apostolat : les apôtres et les diacres suivaient la même route dans la primitive Église.
Ce sera donc l'heureuse occasion, sur le plan diocésain, et sur le plan local, de travailler ensemble « le plus possible » au service de l'Église des Pauvres.
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Au service de l'Église : j'écris ces mots avec une certaine frayeur. S'il s'agissait de Renault et de Citroën s'associant pour un rendement meilleur, les actionnaires se réjouiraient. Deux entreprises se rejoignant obtiennent un rendement, donc un gain supérieur à deux concurrences.
S'il s'agissait d'une société de secours mutuel conjuguant ses efforts avec une œuvre philanthropique, on se féliciterait d'un rendement amélioré.
Mais il ne s'agit ni de bilan, ni de rendements, ni d'humaines constructions.
Il s'agit de l'Église du Christ.
Il s'agit des âmes.
Cela ne se comptabilise qu'avec l'échéance du vendredi saint. Cela ne se calcule qu'au calendrier de l'Éternité. Il ne s'agit plus de statistique, mais de Rédemption. Et le Rédempteur nous fait l'honneur de nous associer à ce travail de son Église. A ce travail caritatif qui ne peut être qu'un reflet de la charité du Rédempteur.
C'est à ce mystère du pain partagé que nous sommes conviés, associés.
Comment voulez‑vous qu'en réfléchissant un instant à cette responsabilité qui nous est ainsi confiée, nous ne comprenions pas combien elle nous atteint au fond de l'âme, cette lueur sur «l'Église des Pauvres» ?
Jean RODHAIN.