Qui appellera demain ?
Jean RODHAIN, « Qui appellera demain ? », Messages du Secours Catholique, n° 191, novembre 1968, p. 10‑11.[1]
Qui appellera demain ?
Un enfant ?
Cet enfant n’a pas appelé lui-même. Il n’oserait pas. Mais ses voisins sont inquiets : Le père boit et bat ce gamin de six ans. On l’entend crier et pleurer chaque soir. Les voisins ont peur de s’adresser au commissaire de police. Alors, on nous téléphone...
Un vieillard ?
Il a vu passer le cortège des grévistes. Il a lu dans son journal les justes revendications pour les salaires.
Mais lui ne peut pas défiler. Et dans les conférences au sommet, il n’a pas la parole. Alors des milliers de vieillards nous appellent pour qu'en leur nom, on intervienne.
Un malade ?
Une carte postale reçue d’un sana. Quatre lignes navrantes de cet étudiant maintenant tout seul dans les Alpes. On ira chercher un correspondant S.O.S. local pour répondre à l’appel de la carte postale.
Un réfugié
Voici un étudiant tchèque qui n’ose pas rentrer à Prague. Il attend. Il n’a pas droit à la carte de réfugié, car il veut garder sa nationalité. Et il espère qu’un jour, Prague retrouvant sa liberté, il pourra rejoindre les siens sans danger. Il demande, non pas l’aumône, mais du travail.
Notre Service « Etrangers » va s’occuper de lui. Encore un « service » qui ne fonctionne que grâce à cette journée du 17 novembre...
Un prisonnier ?
Au courrier, ce matin, une lettre de la prison de Fresnes. Un prisonnier décrit son isolement, évoque ses six enfants à la maison et réclame un colis le plus vite possible. On vérifie. En réalité, le prisonnier en question est un célibataire sans enfants. Il purge une peine de trois mois pour escroquerie et il est libérable dans quinze Jours. Il a expédié la même lettre en même temps à la Croix-Rouge, au Général de Gaulle, à l’Archevêque de Paris, à l’Armée du Salut et au Pape Paul VI...
Le vrai service à rendre à tant de prisonniers sans colis, c’est de mettre en garde contre cet appel abusif.
Un chômeur ?
Statistique : en France, il y a 140.000 chômeurs de moins de 25 ans. Dans un an, il y en aura 300.000. Ces chiffres appellent...
Des sinistrés
C’est en Sicile ou bien en Iran. Les journaux publient les photos du tremblement de terre. Le téléphone sonne toute la journée : « Que faites-vous ? Qu’envoyez-vous ? Voulez-vous des vêtements ? » A ces appels, il faut expliquer l’existence des stocks préparés, les tarifs des avions à payer, l’équipe responsable à embarquer. Le mécanisme est déclenché : mais il ne peut fonctionner 365 jours qu’avec cette collecte d'un jour : 17 novembre.
Une misère proche
Elle a vendu ses bijoux. Le brocanteur est venu enlever les deux fauteuils Louis XV et la belle armoire. Il paraît qu’elle a un neveu à sa charge et qu’elle se prive pour lui payer ses études. Cette vieille dame à cheveux blancs ne dit jamais rien. Mais la concierge apprend qu’elle ne fait plus qu’un petit repas chaque jour. Alors la concierge téléphone à S.O.S.
Un cas de plus à résoudre.
Ou lointaine ?
Telex du Gabon : « Nos avions continuent vols vers Biafra STOP. Avons découvert dans brousse camps réfugiés avec nombreux enfants STOP. - Enfants état épuisement complet. Avons besoin immédiatement 10 tonnes boîtes lait condensé STOP
S.O.S. merci STOP... »
International
On appelle de Genève. Convocation pour samedi : réunion internationale coordination Secours au Biafra.
Si on n’existait pas, qui donc y représenterait toutes les paroisses de France ?
Un certain appel
Quatre lignes seulement. Cet appel en quatre lignes est vieux de 20 siècles. Mais Celui qui nous le lance, Il le répète sans se lasser. « J’avais faim, et vous m’avez donné à manger. J’avais froid et vous m’avez vêtu. J’étais en prison, et vous m’avez visité... »
Cent appels divers
La meilleure réponse, c’est le geste personnel.
La visite que l’on fait soi-même.
La démarche que l’on entreprend personnellement.
Mais le meilleur des cœurs ne peut pas tout entreprendre.
Le cœur a besoin de multiples mains. Ici et au loin.
Voilà pour aider ces mains :
La journée nationale : 17 novembre. C.C.P 5620-09 Paris
[1] Texte non signé mais formellement identifié Jean Rodhain par Françoise Mallebay.