La réconciliation de Noël
Méditation poétique sur Noël
« La réconciliation de Noël », Messages du Secours Catholique, n° 203, décembre 1969, p.3.
La réconciliation de Noël
Voici donc l’humble berger et le roi mage réunis
Entre celui-là avec son seul agnelet
Et celui-ci tout chargé de ses trésors
C’est la rencontre, c’est la réconciliation.
—
Cet enfant dans sa crèche n’a pas dit un seul mot
Mais déjà ceux qui ont vu l’étoile
Et ceux qui n’ont jamais eu d’étoile
Se retrouvent près de lui : réconciliation.
—
Entre Marthe turbulente et Marie contemplante
Entre Pierre impétueux et Jean le silencieux
Il sera la conciliation.
Entre l’Ancien Testament et le Nouveau
Entre la race de David et ceux de toutes races
Il est le point de rencontre.
Ainsi tout autour de cette crèche
Scintille une nouvelle étoile de fils convergents.
Avec, au centre, cet Enfant.
—
Mais si au lieu de regarder alentour
Je contemple ce seul Enfant
Je n’y trouve en lui-même
Que réconciliation.
Entre le Fils de l’homme et le Fils de Dieu
Voici l’identification.
Entre la créature limitée et le Créateur illimité
Voici le point de jonction.
Entre le Péché et le Pardon,
Voici la Rédemption.
—
Pour la première fois depuis Adam
Voici le Père par son Fils présent.
Pour la première fois depuis notre mère Eve
Voici l’Enfant sans la faute.
Pour la première fois depuis le Cantique des Cantiques
« Le roi m’a introduite en ses appartements » :
« Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon votre parole »
Ce qui était inconciliable devient réconciliation
Et le Verbe s’est fait chair,
Et Il a habité parmi nous.
—
L’âne, le bœuf, l’étoile, l’encens
Ne sont que signes d’un décor.
Or, cet Enfant qui est Dieu est bien autre chose qu’un signe :
C’est une présence.
Une ère nouvelle commence :
On dira « l’an de grâce 1970 après Jésus-Christ ».
C’est la présence du ciel avec la terre réconcilié.
Et comme cet Enfant est en Lui-même réconciliation,
Voici que pour nous, venant des cieux,
Les anges chantent dans nos campagnes
Ils chantent pour Lui sa gloire
Et pour nous sa Paix.
—
En décembre, dans le métro, comme au coin du feu,
Il y a tellement d’hommes douloureux
Tant d’inquiets pour demain. Et pour après-demain
Il y en a tant d’écartelés entre ce bien qu’ils veulent
Et ce mal qui se fait,
Cherchant quelqu’un qui, enfin, les réconcilie
Avec la terre et le ciel...
Qu’ils viennent donc là, devant cet Enfant de Noël.
—
Il faut bien un jour quitter ce fil du rasoir
Qui sépare le vide et la foi
Ici ils seront apaisés :
Non plus à cause de l’étoile sur la crèche
Mais à cause de cet Enfant, avec ou sans crèche.
Non pas pour le décor, mais pour la présence.
Dès l’instant où cet Enfant
Est vraiment Fils de Dieu
Je tombe à genoux,
Tout décor s’efface,
Et j’adore en silence.
Jean RODHAIN.