Le carnet de Sidoine
Jean RODHAIN, « Le carnet de Sidoine », Messages du Secours Catholique, n° 151, avril 1965, p. 2.
Le carnet de Sidoine
Question :
J’ai été choqué par l'éditorial du mois dernier. « Messages » prétend qu'il y aurait une crise des vocations religieuses dans les Congrégations spécialisées auprès des malades. Est-ce exact ?
Réponse :
1° Un fait : Chaque semaine une paroisse ou une mairie nous adresse un cri d'alarme parce que « les sœurs ferment l'hospice, faute de recrutement ». Nous trouvons parfois pour relever cet hospice ou ce dispensaire des religieuses espagnoles ou italiennes. Nous ne trouvons jamais[1] de communauté française acceptant d'ouvrir un nouvel établissement.
2° Un chiffre : En France, chaque année, les Congrégations religieuses féminines font le bilan de leur effectif total. Actuellement la différence entre le nombre des décès et celui des entrées est de 1.500 religieuses en moins par an. Et 15% des religieuses ont plus de 70 ans. Avant de publier son éditorial, Messages a fait contrôler ces chiffres par les responsables. On ne peut rien contre les chiffres.
Question :
J'ai appris que « Messages » a reçu de nombreuses lettres de félicitations pour l'article « la Rose et l'Herbier ». Permettez à une famille de l'Est de marquer au contraire son désaccord :
- Vous faites l'éloge des humbles qui servent leur prochain « minutieusement et obscurément » dans leur quartier. Mais pourquoi oubliez-vous les autres qui servent à leur manière dans des postes différents ?
- Vous réconfortez ceux qui sont au service des malades et des infirmes. Mais du même coup vous négligez ceux qui, par vocation pratiquent d'autres formes d'apostolat.
- Vous oubliez les théologiens, les experts au Concile. S'il n'y avait que des jardiniers, il faudrait fermer les bibliothèques. Vous êtes incomplet, donc partial.
Réponse :
A. - Oui, hélas ! l'auteur que j’ai interrogé, reconnaît qu'il est incomplet et avoue qu'il est partial. Il convient qu’un jardinier qui cultive les roses n'entend rien à la protection des tulipes. L’auteur à concédé enfin devant moi qu'il avait un cœur trop humain, coupable de préférer - fussent-ils mal élevés - ses propres enfants à ceux du voisin. A ce père dénaturé, j'ai rappelé que cette préférence ne doit pas empêcher les chrétiens dissemblables de s’aimer tels qu'ils sont,
B. - Oui, l'auteur, que j'ai prié de s'expliquer sur le paragraphe où il est question du sel de l'Évangile et de l'eau colorée, a fini par reconnaître que sa phrase est ambiguë et peut prêter à confusion. Il regrette d'avoir peiné involontairement quelques amis. Pour se défendre, il expose que c'est la loi du genre. Ni une fable, ni une parabole ne sont des traités théologiques englobant tous les modes d'apostolat. Il s'agissait de réconforter les « simples gens dont les gestes discrets sont le trésor secret de l'Église au service des pauvres ». Une note au bas de la page renvoyait à un long article de Messages sur le rôle capital de ceux qui travaillant au service des structures et des institutions. La parabole du rosier ne voulait pas traiter des multiples autres fleurs si variées dans les jardins terrestres et célestes.
C. - je ne pense pas que dans sa fable du jardinier l'auteur ait voulu attaquer les experts du Concile. Car il est lui-même au Concile un des experts attachés au Schéma X : « Apostolat des Laïcs » et au Schéma XIII : « Présence de l'Église au monde actuel »...
D. - Quant à l'importance des qualités professionnelles de la personne humaine, j'ai quitté l'auteur de l'article tout enfermé dans un entêtement irréductible.
SIDOINE.
[1] Si vous connaissez une communauté de religieuses françaises avant la possibilité de prendre en charge un hospice ou un dispensaire, veuillez nous l'indiquer. Nous vous remercions.