Un merci spécial
Jean RODHAIN, « Un merci spécial », Messages du Secours Catholique, n° 165, juillet-août 1966, p. 5.
Un merci spécial
Les tablettes découvertes dans les fouilles de Babylone, comme les archives d'une abbaye du XIIe siècle, révèlent surtout des textes relatifs à des procès, à des différends ou à des dettes. En effet, les notaires, et c'est leur devoir, conservent les actes touchant les questions litigieuses. L'historien véritable, en dépouillant des archives, ne doit pas se limiter à cet aspect « solidifié ». Il doit reconstituer aussi la vie qui ne s'écrit pas. Quand une communauté vit en paix, quand ses membres s’aiment en charité, ces gens heureux n'ont pas d'histoire ni d'historiens.
Quand les historiens de l’an 3000 examineront celles des ruines de 1966 qui auront résisté aux événements, ils découvrirent les écrits de notre époque. Ils risquent de s’imaginer qu'en ce temps la France était toute déchirée de discussions. Je souhaite que les archéologues de l’an 3000 mettent aussi la main sur les archives comptables du Secours Catholique. Ces chèques et ces humbles mandats leur révéleraient avec quelle générosité, avec quelle unanimité, avec quelle charité fraternelle, une communauté dispersée dans toutes les villes et tous les villages de France, une communauté innombrable et discrète, travaillait en paix au service des plus pauvres.
Je sais que depuis le début de l'année, « Messages » a, pour des objectifs très divers, multiplié les appels. Vos réponses généreuses se sont multipliées aussitôt.
Je voudrais aujourd'hui crier sur les toits un merci assez ample. Je voudrais aussi que les archéologues de l'an 3000, quand ils feront le bilan de notre temps, n'oublient pas cette histoire qui ne doit pas s’écrire : les chrétiens véritables croient à la Charité. Cela domine tout le reste.
J. R.