"Migrants et réfugiés", article du blog de François Euvé
"Migrants et réfugiés"
On connaît le souci du pape François pour la question migratoire, symbolisée par son premier déplacement à Lampedusa. Ses messages pour la journée mondiale des migrants (fêtée le 14 janvier, mais le texte est rendu public un an auparavant) font partie des déclarations fortes de son pontificat. Un nouveau message a été récemment publié. Il a attiré l’attention des médias pour quelques passages, en particulier celui où le pape dit qu’il faut « faire passer la sécurité personnelle avant la sécurité nationale ». On a relevé aussi l’octroi de visas temporaires, l’encouragement au regroupement familial, y compris sur plusieurs générations.
Pour François, la question migratoire est un « signe des temps ». Cela veut dire que c’est non seulement un phénomène de grande ampleur qui n’est pas voué à disparaître, mais que c’est aussi une chance à saisir pour ouvrir un horizon qui a toujours tendance à se fermer. On n’assurera pas la sécurité à long terme de nos pays en nous barricadant et en laissant à la porte ceux qui ont besoin d’aide. La distinction entre migrant et réfugié importe peu ici. Il s’agit de « tout être humain contraint à quitter sa propre patrie à la recherche d’un avenir meilleur ». Les contraintes sont de divers types : guerres, terrorisme, mais aussi crise économique, racisme, etc.
Le propos est structuré autour de quatre verbes, qui sont quatre étapes du processus : accueillir, protéger, promouvoir et intégrer. Avant de réfléchir sur les mesures concrètes, il faut se remettre face à l’essentiel : le souci de la personne humaine dans sa singularité, qui prime sur son identité culturelle ou religieuse. Pour le pape, la rencontre est source d’enrichissement mutuel (il revient fortement sur ce point dans son livre d’entretien avec Dominique Wolton), si elle est menée dans des conditions de confiance (si la méfiance prime dès le départ par excès de mesures administratives, la rencontre risque d’être manquée). Dans l’analyse du phénomène migratoire, l’enjeu humain reçoit une attention prioritaire.
Le discours est-il « irresponsable », au sens où un accueil trop large mettrait en péril la culture des pays d’accueil ? La préservation de la culture des migrants prime-t-elle sur celle des pays d’accueil ? La question est de savoir à quel niveau ce texte est lu. Si on le prend comme une feuille de route qui préciserait des modalités pratiques de l’accueil, il soulève alors de nombreuses questions. En revanche, il définit un horizon susceptible de déplacer la tendance spontanée à la méfiance. Il faudrait qu’il soit complété par des récits concrets d’accueil qui montrent ce qui peut effectivement fonctionner et les points sur lesquels il convient d’être vigilant. C’est la seule manière d’échapper aux propos trop généraux, qu’ils soient par principe favorables à un accueil le plus large possible ou, au contraire, hostiles. Une fois encore, il en va d’une question de discernement…
Retrouvez l'article du Père François Euvé sur son blog ici.