Le carnet de Sidoine - 74-05
Jean RODHAIN, "Le carnet de Sidoine", MSC, n° 252, mai 1974, p. 2.
Le carnet de Sidoine
Question 1
- Il semble que le Secours Catholique déconseille les collectes en nature pour l’Afrique, cependant je connais des amis qui envoient régulièrement des colis à des missionnaires. Que faut-il en penser ?
Réponse :
- Le ramassage à travers la France de collectes en nature et le triage puis l’acheminement totaliseraient des frais prohibitifs. Voilà pourquoi le Secours Catholique se consacre à des expéditions homogènes par tonnages importants.
Mais chacun peut expédier vers l’Afrique à un destinataire précis le Colis dit « familial ». Il est limité à 3 kg et doit porter une étiquette « douane ». Le prix du transport de ce colis de 3 kg par voie maritime est de 5,65 F et par voie aérienne de 35,65 F. Il semble que ce système fonctionne bien et permette de rendre de réels services à des missionnaires ou à des dispensaires de brousse.
Question 2
- Connaissez-vous une œuvre qui s’intitule « Aide à l’Église en détresse » et pouvez-vous nous donner un avis sur son utilité ?
Réponse :
- L’œuvre de l’Aide à l’Église en détresse a été fondée par le Père Werenfried van Straaten, religieux prémontré de l’Abbaye de Tongerlo (Belgique), pour prendre en charge la pastorale de millions de réfugiés allemands et le soutien de leurs prêtres expulsés de leur pays d’origine à la suite des accords de Potsdam.
A partir de 1950, ses activités s’étendent au soutien de l’Église dans les pays au-delà du rideau de fer où la persécution commence à sévir. C’est dans cette voie que l’œuvre trouvera sa véritable finalité : elle est, en effet, la seule œuvre catholique dont l’objet essentiel a été, depuis vingt-cinq ans, d’aider l’Église à survivre dans ces pays.
De multiples témoignages. prouvent que ses actions, outre qu’elles aident les chrétiens à prendre conscience des problèmes actuels de l’Église universelle, débouchent sur une solidarité concrète exprimée dans la prière et le partage.
Adresse : 50, rue de Marly, 78750 Mareil-Marly.
Question 3
- Les pétroliers savent forer à 2.000 mètres de profondeur pour exploiter les poches de pétrole ou de gaz. Pourquoi le Secours Catholique ne ferait-il pas de même pour l’eau ?
Réponse :
- Un forage à grande profondeur est une des multiples solutions possibles. Mais un forage de cette importance, non seulement coûte très cher, mais surtout il exige ensuite pour fonctionner une force motrice, des pièces de rechange et des techniciens sur place en permanence. Dans les petits villages du Sahel, le Secours Catholique choisit systématiquement la solution la plus simple : le puits creusé et entretenu par les gens du village eux-mêmes. Avant tout nous donnons la préférence à la solution la plus adaptée au niveau de vie des habitants. Nous nous limitons obstinément à travailler « au ras du sol ».
Question 4
- À l’heure actuelle connaît-on le nombre de réfugiés chiliens recueillis en Europe et quel est le pays qui en a reçu le plus ?
Réponse :
- Dix-neuf pays européens ont accueilli un total de 3.927 réfugiés. La France vient au premier rang avec 877 réfugiés dont 596 Chiliens.
Question 5
Combien le Secours Catholique a-t-il envoyé d’experts sur place au Sahel ?
Réponse :
Aucun. Car les responsables locaux se plaignent de la surabondance d’experts envoyés sur place. Les expertises faites dans le domaine de l’hydrologie sont déjà réalisées. Et d’autre part l’expérience millénaire des habitants est irremplaçable.
Pour connaître les besoins exacts nous avons créé un service spécial Sahel qui réunit toute la documentation envoyée ici par les réseaux des Caritas locales et par la Centrale de Caritas Internationalis qui nous tient quotidiennement au courant grâce au télex qui nous relie à Rome.
Question 6
Devant tant d’œuvres diverses je me demande si par économie, par rationalisation, on ne pourrait pas tout fusionner et tout ramener à un seul organisme ? Qu’en pensez-vous ?
Réponse :
Une forêt n’est pas une bouillie d’arbres, ni une marmelade d’arbres ; c’est la diversité des arbres différents dont chacun est enraciné profondément dans le sol qui constitue une belle forêt. Cherchons à coordonner le travail, mais en laissant à chaque œuvre sa personnalité et son originalité. C’est une loi de tous les êtres vivants.
Question 7
A notre époque, qui est celle des ordinateurs et de l’exploration de la lune, on est parvenu à une telle précision scientifique que l’on ne voit plus bien la place de la charité de jadis.
Réponse :
La précision dite scientifique dont vous parlez à été incapable de prévoir la sécheresse au Sahel et tous les ordinateurs du monde n’ont pas su annoncer la crise du pétrole. Soyons donc modestes.
Les plus grands spécialistes (cf. Club de Rome) prévoient pour les années à venir une aggravation de la situation à l’échelle mondiale.
En face des nouvelles formes de cette misère mondiale, s’il n’y a plus de place pour la Charité du XIIIème siècle, il reste à inventer une Charité de l’an 2.000. La Charité doit toujours être « en avant ».
Question 8
Nous suivons attentivement le travail du Secours Catholique au Sahel. Aussi nous aimerions savoir si le récent coup d’État au Niger a eu des répercussions sur vos activités dans ce pays si éprouvé par la sécheresse ?
Réponse :
Il faut une vigilance continuelle pour s’abstenir de toute activité politique directe. Mais cette ligne de conduite permet à la Croix Rouge comme au Secours Catholique de poursuivre une action indiscutée au service de tous sans exception, même dans les soubresauts d’une guerre civile : la Caritas Niger continue son travail sans un seul instant d’interruption.