Le carnet de Sidoine - 72-09
Jean RODHAIN, "Le carnet de Sidoine", MSC, n° 233, septembre 1972, p. 2.
Le carnet de Sidoine
Question 1
- Dans votre dernier numéro vous citez (page 1, colonne 2) le cas de cette femme qui demande une aide pour aller jusqu’en Inde rechercher son enfant enlevé par son mari. Est-ce un fait réel ? Qu’en est-il advenu ? Et quelle conclusion peut-on en tirer ?
Réponse :
Le fait est exact. Après vérification et témoignage de l’avocat, le Secours Catholique a payé le billet d’avion pour Bombay. Sur place un missionnaire et un chef d’ashram ont réussi à récupérer l’enfant. Le tribunal local a autorisé la remise à sa mère.
Celle-ci, toute rayonnante de joie, est venue présenter son fils retrouvé au personnel du 106, rue du Bac, le 4 juillet dernier.
Quelles conclusions ?
Primo : La Justice avec un petit ou un grand J ne résout pas tous les problèmes humains.
Secundo : Sans les envois quotidiens des lecteurs de « Messages » nous serions incapables de financer des opérations de ce genre qui se présentent continuellement.
Question 2
On raconte dans ma paroisse que le groupe de nos vieillards de l’hospice départemental est revenu de votre Cité-Secours de Lourdes heureux, mais avec des cierges et des médailles. Or, je croyais que la Cité ne vendait rien. Pouvez-vous m’expliquer cela ?
Réponse :
Primo : Depuis sa fondation, la Cité s’interdit absolument tout commerce quel qu’il soit.
Secundo : Aux pèlerins hébergés, leur voisin, de quartier ou leur parent malade confient souvent avant leur départ une petite somme pour - faute de pouvoir venir à Lourdes - recevoir à leur retour une médaille ou une statuette. Nos hébergés se procurent alors ces souvenirs dans les magasins de Lourdes, Ainsi en recevant 200.000 pèlerins la Cité-Secours a procuré une clientèle supplémentaire aux commerçants de Lourdes.
Question 3
Pendant mes vacances, j’ai entendu à la grand-messe du village le Curé parler de l’aumône. Voilà encore un mot périmé que personne ne devrait plus employer. Tendre la main vers quelqu’un, quel geste de dépendance, si contraire à la dignité de la personne humaine en 1972. Qu’en pense Sidoine ?
Réponse :
Moi Sidoine je viens de faire 2.000 km au volant de ma voiture. A la sortie de toutes les villes qu’ai-je vu ? Des mains tendues, des pancartes, présentées, une foule alignée d’auto-stoppeurs sollicitant l’aumône des transporteurs.
Si ces quêteurs de kilomètres étaient des paralytiques ou des vieillards, je comprendrais fort bien que leur âge où leur infirmité les contraignent à cette dépendance et à cette imploration. Mais je n’ai pas vu de grabataires, ni de vieillards non plus parmi ceux qui tendaient la main pour être transportés.
On a toujours besoin des autres…
Question 4
On m’affirme que dans mon quartier, où cependant je crois connaître tous mes voisins, il existe une jeune infirme qui n’a jamais été promenée hors de sa chambre tellement ses parents ont peur de ce qu’on dira. Est-ce possible, est-ce croyable ?
Réponse :
Ce n’est pas « possible » : c’est fréquent. Dans chaque rue il existe de multiples souffrances ignorées, Le monde ne veut pas regarder la misère en face. C’est pourquoi « Messages » a besoin de vous pour faire connaître la réalité qu’il s’agisse du Tiers-Monde ou de votre propre paroisse.