20 francs de soleil
Jean RODHAIN, « Vingt francs de soleil », Messages du Secours Catholique, n° 66, mars 1957, p. 12.
20 francs de soleil
Printemps: Les jours s’allongent et le soleil reprend son règne. Revenant de chez le pharmacien, la mère soucieuse ose entrouvrir davantage la fenêtre auprès des petits lits. Ainsi Ie soleil balayera un instant le parquet avec son pinceau d'or et de santé. Ah ! si seulement on pouvait en acheter, pour les petits, quelques rayons : vingt francs de soleil.
Depuis ce mercredi éteint comme des cendres mortes, le Carême allonge son chemin de pénitence. Ce chemin aboutit bientôt infailliblement à cette aveuglante lueur du tombeau illuminé : Pâques dépasse tous les soleils en révélant le Christ Glorieux. Pour le voir sans nuages, les chrétiens se privent : c'est le jeûne et l'abstinence. Les fruits de leurs privations, depuis la Primitive Église, les chrétiens les partagent avec leurs frères. Le Christ, c'est le pain partagé. C'est la chaleur de la Charité : C'est déjà le soleil de Pâques entrevu et distribué. Ah ! si seulement on pouvait déjà, en ce long Carême, en glaner quelques rayons : Vingt francs. Mais non, ce qui est partagé n'a pas de prix. Cela vaut tout l'or du monde.
Mais si : voici qu'en ce Carême chacun peut déjà gagner et partager à la fois des bribes dorées, des heures entières de clair soleil, des étincelles de vraie chaleur. C'est le plein été dont un enfant avance les aiguilles au cadran de la santé. C'est le soleil de la mer et de la montagne assuré pour cent enfants au teint de cendres. Vingt francs de soleil. C'est le Carême qui vient déjà vous quêter pour que Pâques soit radieux.
Mgr Jean RODHAIN.