Discours du Pape François à Gênes : le "travail pour tous" préférable au "revenu pour tous"
Au cours de sa rencontre avec le monde du travail à Gênes le samedi 27 mai 2017, le pape François a abordé la question du revenu universel. Extraits. Traduction de l’italien par Luc Dubrulle.
Les hommes et les femmes se nourrissent du travail : avec le travail ils sont « oints dans la dignité ». Pour cette raison, le pacte social est construit autour du travail. C’est le nœud du problème. Parce que quand on ne travaille pas, ou qu’on travaille mal, ou qu’on travaille peu ou qu’on travaille trop, c’est la démocratie qui entre en crise, c’est tout le pacte social. C’est aussi le sens de l’article 1 de la constitution italienne, qui est très beau : « L’Italie est une république démocratique fondée sur le travail ». Sur cette base, nous pouvons dire que la suppression du travail ou l’exploitation des gens avec un travail indigne ou mal rémunéré, est anticonstitutionnel. Si elle n’était pas fondée sur le travail, la république italienne ne serait pas une démocratie, parce que les emplois seraient occupés et auraient toujours été occupés par les privilégiés, les castes, les rentiers. Il faut alors regarder sans peur, mais avec responsabilité, aux transformations technologiques de l’économie et de la vie et ne pas se résigner à l’idéologie qui prend pied dans le monde, qui imagine un monde où seulement la moitié ou peut-être les deux tiers des travailleurs travailleraient, et les autres percevraient un chèque social.
Il doit être clair que le véritable objectif à atteindre n’est pas le « revenu pour tous », mais le « travail pour tous » ! Car sans travail, sans travail pour tous, il n’y a pas de dignité pour tous. Le travail d’aujourd’hui et de demain sera divers, peut-être très divers – pensons à la révolution industrielle, il y a déjà un changement ; ici aussi il y aura une révolution – il sera très divers du travail d’hier, mais il devra être du travail, non une pension, non des pensionnés : travail. Si l’on prend sa retraite à un âge juste, c’est un acte de justice : mais c’est contre la dignité des personnes que de les envoyer en retraite à 35 ou 40 ans, donner un chèque de l’État, et débrouillez-vous ! « Mais, j’ai de quoi manger ? ». Oui. « J’ai de quoi faire subsister ma famille, avec ce chèque ? » Oui. « J’ai de la dignité ? » Non ! Pourquoi ? Parce que je n’ai pas de travail. Le travail d’aujourd’hui sera divers. Sans travail, on peut survivre ; mais pas vivre ; il faut le travail. Le choix est entre le survivre et le vivre. Et il faut le travail pour tous. Pour les jeunes… vous savez le pourcentage de jeunes de moins de 25 ans, inoccupés, en Italie ? Je ne vous le dirai pas : regardez les statistiques. Et ceci est une hypothèque sur le futur. Parce que ces jeunes grandissent sans dignité, parce qu’ils ne sont pas « oints » dans le travail qui est ce qui donne la dignité. Mais le nœud de la question est ceci : un chèque mensuel de l’État, qui permet la subsistance de ta famille ne résout pas le problème. Le problème ne peut être résolu qu’avec le travail pour tous.
Retrouvez le texte original du Pape François ici.